"The new kings of the British Metal Underground". Kerrang!
Genre... En fait, généralement, ce type d'affirmation péremptoire me donnerait plutôt envie de casser le produit marketing calibré caché derrière la prétendue révélation du moment. En plus, le patronyme de ce nouveau super boyz band anglais est un peu cul-cul la praline. Sarpanitum, ça veut sans doute dire un truc très sérieux du style « Passe moi le sel Belzébuth » en paléo araméen, mais ça n'en a pas moins un petit arrière-goût évoquant au choix le serpent du livre de la jungle (
Cesssssez de ssssucccer votre pouccccce Messsssire Chrissssss ! ») ou l'un de ces super-vilains en caoutchouc que X-OR (
le shérif de l'espace hein, pas l'opérateur logique) finissait toujours invariablement par découper en deux à coup d'épée laser. M'enfin halte aux préjugés, d'autant plus que ces jeunes poulains ne sont pas issues des écuries Nuclear Blast ou Metal Blade, et voyons donc ce qui se passe sous le ciel métallique grand-breton.
Eh bien à première vue, le ciel anglais dont il est question ici est plutôt bas de plafond et poussiéreux, genre voûte de catacombes mésopotamiennes, voire encore plus bas, à la mode couvercle de vieux tombeau oublié au fin fond d'un temple aussi maudit qu'englouti. Enfin vous voyez le tableau. Les plus cyniques diront sans doute qu'à travers ce ciel de carton-pâte, on peut distinguer assez distinctement l'azur égypto-floridien d'un
Nile, au vu de la flagrante parenté thématico-musicale entre ces deux groupes. Densité du son, aptitude à asphyxier l'auditeur dans un nuage de poussière millénaire, ambiances de cérémonies funéraires et de combats mythologiques, thématique explorant les vices de nos ancêtres de l'ère pré-Star Academy, puissance des incantations polyphoniques, attaques brutal death massives, blasts et double à fond les pharaons: tout le savoir-faire de la bande à Sanders a ici été recyclé, et transféré d'Egypte en Mésopotamie (
autrement dit grosso-modo en Irak; c'est d'ailleurs pas tous les jours que l'on peut être heureux de voir des anglo-saxons blaster les chaumières par là-bas !). Alors, rip off éhonté ou hommage un peu trop appuyé ?
Avant d'essayer de répondre à la question, deux constats assez flagrants: côté yang, « Despoilment Of Origin » sonne étonnamment frais et puissant, et côté yin, pas un instant de l'écoute de cet album on n'arrive à éluder les références au grand frère
Nile.
Force est de constater que si Sarpanitum ne devait être considéré que comme un ersatz des floridiens, la copie serait néanmoins loin d'être édulcorée, et elle aurait autant, si ce n'est plus de goût que l'original. Goûtez-moi donc l'impressionnante introduction qu'est « Seducing The Phallus Throne » ou encore ce mètre étalon de l'union symbiotique entre puissance dévastatrice et mélodies orientalisantes qu'est « Cur Defilement »: ça ne sent pas la fougue à bandelettes et le parfum camphré du
« Amongst … » de la bande de détrousseurs de pyramides peut-être ? Ca bute pareil, c'est dense, ça pose savamment des ambiances délicieusement malsaines ancrées dans les mythes de l'orient fondateur. Les riffs death ont des détours vicieux et d'occasionnelles dissonances qui sentent le vieux sarcophage. Le rendu est sourd, caverneux et fleure bon la poussière de souterrain suffocant creusé six pieds sous le sable. Le tout a de plus le bon goût d'être éclairé d'intervention lead relativement lumineuses ayant par moment même un brillant tout
Schuldinerien (
à 2:16 sur « Seducing The Phallus Throne »). Parfaitement complémentaires, growls profonds et rocailleux - majoritaires sur cette galette – et invectives black metal (
Tiens, un début d'émancipation ?) se partagent la vedette pour une efficacité maximum. Les mélodies sont bien là, miel pour l'oreille du délicat amateur de death aéré, et même quand le respect des codes du genre pratiqué fait qu'on se ramasse quelques passages impressionnants mais aussi lisibles et excitants que la lecture de papyrus rafraîchis à l'urine de dromadaire (
le début de « Halls of Decadence », le relativement convenu « Dawn of Enthrallment », les lourdeurs du début de « Despoilment of Origin »), le tout reste quasiment tout le temps digeste. En ce qui concerne les grands moments, on pourra retenir au hasard la superbe échappée black metal atmospherique de « Provocation Of An Eternal Odium » à 2:39, et sa continuation logique plus loin, à 4:16. On citera aussi, pour compléter cet échantillon riquiqui, la puissance de feu incroyable déployée à 2:58 sur « Cur Defilement » ou encore la fière traversée du désert offerte à 1:20 sur « Seducing The Phallus Throne ».
Pour résumer, Sarpanitum sort avec « Despoilment of Origin » un skeud extrêmement léché et efficace, aussi carré que apte à évoquer avec succès et vigueur les images de civilisations aujourd'hui disparues. Mon enthousiasme sera toutefois légèrement entaché par le fait que l'excitation qui aurait du me saisir pleinement si j'avais été vierge de toute trace brutal death pyramidienne, n'a pas eu l'intensité escompté, du fait du passage précédent, il y a quelques années, d'un certain
« Amongst the Catacombs of Nephren-Ka » qui joue à 100% dans la même cour. Sarpanitum reprend donc avec talent la recette du grand frère, la rafraîchit un peu, y injecte la fougue de la jeunesse, en retire les artifices sans intérêts (
« Despoilment …» sonne quand même moins hollywoodien que les derniers offrandes de Nile), mais reste à ce point dans les traces de son aîné qu'on ne peut véritablement évoquer cet album sans se référer sans cesse à celui-ci. Une énergie et potentiel gigantesques donc, reste maintenant à les utiliser pour couper le cordon avec les dents !
7 COMMENTAIRE(S)
21/08/2008 15:22
Ah mince, c'est vrai. J'avais en fait encore en tête la lecture de "Choosing Death", le bouquin où on apprend que Karl Sander a longtemps partagé une piaule avec des Morbidangeliens - d'où l'influence d'ailleurs ... Donc tout ça pour moi c'était pas bien loin de Tampa ...
21/08/2008 15:16
21/08/2008 06:48
Merci !
@Xeno: si si, n'aie crainte !
21/08/2008 01:18
20/08/2008 23:41
20/08/2008 23:32
Dans la chro de CosmoLoco, je pensais un poil à toi en écrivant: "... aux orthodoxes du genre qui se prennent le chou à jouer les gardiens du temple de leur musique chérie"
(Heureusement que tu aimes Ufych Sormeer quand même hein !)
20/08/2008 20:42