The Dali Thundering Concept - Savages
Chronique
The Dali Thundering Concept Savages
On a beau le répéter régulièrement mais la qualité de la scène française n’a rien à envier à celles du Nord de l’Europe ou de l’autre côté de l’Atlantique, et une fois encore il y’a de quoi s’enthousiasmer pour celle de notre beau pays, via notamment ce quatuor parisien fort ambitieux et qui a toutes les clés en main pour devenir un des leaders du Djent et Mathcore hexagonal. Encore peu connu celui-ci a pourtant un vrai vécu et un premier opus sorti en 2014 (le très prometteur « Eyes Wide Opium ») qui montrait une musique habile et à la construction intéressante, qui ne demandait qu’un peu plus de temps et de maturité pour que la chrysalide se transforme en papillon. Après une longue attente due à la fois à des mouvements de personnel (arrivées d’un nouveau bassiste et batteur), de nombreux concerts joués et une signature chez Apathia Records, revoilà le binôme originel et ses deux nouveaux frères d’armes prêts à en découdre et qui se sont donnés les moyens de leurs ambitions, tant la différence entre l’ancienne et la nouvelle livraison est flagrante, pour un résultat qui fait très mal tout en se montrant à la fois totalement à part et difficilement classable.
Car résumer la musique du combo à du simple Metal alambiqué et syncopé serait une erreur grave, certes on retrouve les rythmiques typiques du genre mais elles ne sont que la partie émergée de l’iceberg, tant l’ensemble va surprendre et étonner en se permettant le luxe d’incorporer des éléments que l’on n’a pas franchement l’habitude d’entendre au milieu des guitares saturées et des murs sonores si caractéristiques. Avec une thématique globale du disque qui anticipe un scénario crédible sur l’avenir sombre de l’humanité et de notre planète si l’on conserve nos habitudes actuelles, et que l’on continue de se regarder le nombril en oubliant à la fois le réchauffement climatique, la division des richesses et une démographie galopante. Pourtant malgré ce constat guère optimiste la musique des parisiens se révèle paradoxalement plutôt lumineuse et pleine d’espoir, comme c’est le cas avec le titre d’ouverture « Ostrich Dynasty » où les classiques et écrasantes rythmiques désarticulées se retrouvent installées sur un léger voile synthétique et aérien, tout en y voyant l’ajout de notes plus électroniques et futuristes comme pour signifier qu’un autre avenir est possible. Au milieu de ce mélange particulièrement lourd les gars ont eu l’excellente idée de rajouter des passages jazzy éthérés et vraiment agréables à écouter, qui servent de pause et de respiration avant le retour du gros son. En guise de démarrage la barre est donc déjà placée très haut tant elle donne le ton de ce qui va suivre, tout y mêlant intelligemment ce que l’on va retrouver tout du long de cette galette. Si la bande dans la foulée de cette livraison va privilégier le classicisme avec les très bons et désynchronisés « The Myth Of Happiness » et « Blessed With Boredom » (où quelques courtes parties brutales et rapides font leur apparition), c’est surtout en faisant plus éclectique et technique qu’elle va marquer les esprits. Tout d’abord elle va montrer une facette plus accessible et moins agressive, sans pour autant tomber dans la facilité, c’est le cas avec « There’s No Calme Before The Storm » à la lourdeur totale et à la vitesse absente, qui va à l’essentiel sans chercher à en faire trop, au contraire du dantesque « Ink » au tempo d’une grande variété et aux effets de guitare nombreux. Car Léo Natale sur ses cordes réalise une prestation épique et d’une précision redoutable, n’hésitant pas à éclairer son jeu de parties mélodiques et progressives où les cassures sont aussi nombreuses que les notes jouées, le tout avec une basse de Steve Tréguier ronflante et suffocante qui renforce cette sensation d’écrasement général. Si ici les claviers étaient nettement en retrait ils sont au contraire plus que jamais d’actualité avec le barré « Utopia » où toute la panoplie entendue lors de la première compo est de nouveau de sortie, avec notamment un break électro/jazz bien agréable que l’on pourrait croire sorti d’une compilation du fameux “Buddha Bar“, pour là-encore un résultat à la fois ambitieux et accessible, tout comme le surprenant « We Build The Past » qui se différencie totalement du reste. Composé de deux parties distinctes cet ultime bijou démarre par quelquechose de doux et cotonneux avant que le chant et les chœurs ne montent doucement en pression jusqu’à haranguer l’auditeur, via un côté martial et aux relents symphoniques, avant que la suite ne soit qu’un long passage instrumental où les riffs épileptiques rugissent une dernière fois, mais de manière plus sage et apaisée.
Du coup là-encore l’ambiance n’est pas trop sauvage, mais suffisamment bien foutue pour que ça ne tombe à plat, tout comme les interludes originaux qui servent à part entière le disque. En effet « Cassandra » à la fois planant et dansant dans sa seconde moitié, qui pourrait être diffusée en discothèque (et où est citée dans les paroles figurant sur le livret un extrait de dialogue de « Un Roi à New-York, de Charlie Chaplin – 1957) sert de tremplin pour la suite, tout comme « Demeter » qui joue plus sur la nostalgie. Ici ça sent l’automne et les pluies importantes (d’ailleurs on l’entend qui tombe au tout début) avant que le tout ne résonne façon club de Jazz entre claviers discrets, trompette, piano et voix féminine pleine de chaleur et de mélancolie, et ne serve d’écho étrange à cet opus qui ne cesse d’étonner.
Et même si l’ensemble n’est pas exempt de défauts, comme les sympathiques mais moins inspirés « Flying With The Shepherd » et « Empty The Void » (qui jouent un rôle de remplissage), et que la durée globale de la galette aurait pu être raccourcie, il ne faut pas cependant sous-estimer la qualité et la quantité de travail fournies par les mecs. A la fois fluide et cohérent, malgré la multitude de choses proposée, on ne peut que saluer la prise de risques effectuée par eux car il n’est jamais évident de mélanger autant de choses si radicalement différentes. On aurait sans doute aimé un plus grand nombre d’éclairs de vitesse et un peu moins de plans massifs à la TEXTURES ou MESHUGGAH, mais cela n’est que mineur tant on est en présence de quelquechose qui mérite le détour, même pour les novices, et qui demandera énormément de temps pour être totalement assimilé et apprécié à sa juste valeur.
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1 COMMENTAIRE(S)
citer | Franchement décevant... Hormis la bonne prod' et pas mal de trouvailles bienvenues, on est bien trop souvent dans la mauvaise tendance du metal moderne vulgaire, et avec des riffs entendus mille fois. Dommage parce qu'il y'a des idées là-dedans. |
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1 COMMENTAIRE(S)
05/05/2018 16:15