Quand on parle de la scène Grindcore de nos amis teutons, on s'attarde bien souvent sur les historiques (Dead et Blood, pour ne citer qu'eux), voire sur la frange PV/Fastcore aussi active que qualitative (je vous encourage à aller découvrir ill!
* et leurs amis). Et, pour les plus tordus, sur Gut, légende du Goregrind à tendance pornographique. Tout ceci laisse peu de place à Japanische Kampfhörspiele,
JaKa pour les intimes, et c'est bien dommage. Je ne vous jette pas la pierre, jusqu'à ce que
"Verk Ferever" chatouille mes tympans, j'avais complètement oublié l'existence du groupe, pourtant actif depuis 1998, jugez du peu ! Ils font partie des meubles, ce qui ne les empêche pas de garder la niaque et de vouloir sortir du lot.
C'est que
JaKa ne joue pas du Grindcore classique. Bien au contraire, depuis ses débuts tâtonnants jusqu'à ce neuvième (!) opus, la troupe de Christof Kather, seul membre d'origine, est passée par bien des étapes, déconstruisant toujours plus son Grindcore, tantôt complètement débile (l'album
"Rauchen und Yoga", par lequel je les ai découverts en 2007), tantôt délicieusement frénétique (
"Bilder fressen Strom", en 2010). Une sorte d'Antigama un peu
cheapos, moins cérébral, certes, mais diablement attachant. La filiation avec les légendaires Polonais est d'ailleurs plus que jamais évidente, tant la section rythmique de ce
'Verk Ferever", garnie de descentes de toms frénétiques et saupoudrée d'une caisse claire métallique à souhait, semble tout droit sortie des plus belles heures de
"Discomfort". Enfin, "filiation"... Plutôt une influence, revendiquée ou non, nos Teutons ayant bien plus d'années au compteur que Łukasz Myszkowski et sa clique.
Difficile à suivre ? Normal. C'est que le quatuor s'amuse avec nous. Ils brouillent les pistes, les saligauds ! Le premier titre, "Sozialisationsschaden", laisserait presque le néophyte s'attendre à un énième ersatz de Nasum, tant il aurait pu figurer dans un
"Shift". Mais non, les choses s'emballent dès le second titre, concentré de ce qui fait tout le charme de JaKa, ingrédients judicieusement choisis que l'on retrouvera tout au long des 15 morceaux de l'opus. La batterie et les nombreuses couches de toms, presque tribaux, qui s'amusent à nous faire de bons crocs-en-jambe, les samples, et le riffing, somme toute relativement basique, mais non moins puissant. Ne vous attendez cependant pas à du
blast-beat en quasi-permanence, ce n'est pas le créneau JaKa. Si nous avons malgré tout le droit à des accélérations bien senties (le frénétique "Keinen Bock mehr", l'implacable "Befehlsempfänger "), le tempo est majoritairement lent, laissant tout le loisir aux musiciens de déconstruire leur Grindcore, d'y ajouter ce petit grain qui fait toute la différence... Sans pour autant être toujours réussi.
Forcément, dès qu'on veut sortir des sentiers battus, se casser la gueule devient un risque non-négligeable. JaKa a beau avoir de la bouteille, il n'évite cependant pas quelques travers. Globalement,
"Verk Ferever" est réussi, c'est indéniable. La plupart des morceaux sont bien pensés, bien construits, et les ajouts faisant office de
"caution expérimentale" servent plus qu'ils ne desservent : les trompettes asthmatiques qui parsèment l'opus, par exemple, sont utilisées ainsi pour renforcer l'atmosphère étouffante de certains titres, notamment "Im Feierabendverkehr" et "Kapitalismuswohlstandfortschritt ", empilements de pistes rythmiques, vacillant à chaque instant, mais qui ne tombent jamais. Une grande partie de la force de JaKa réside d'ailleurs dans le jeu de batterie de Christof Kather, qui, s'il n'est pas un monstre de technique, sait suffisamment casser la démarche pour que l'on ait besoin de retrouver nos repères. D'autant que
"Verk Ferever" nous perd parfois trop. La faute à des choix pas toujours très heureux (Les 40 secondes de "Zufrieden sein", qui font presque un peu tâche), mais aussi à quelques longueurs, qui atteignent des proportions folles sur le morceau-titre : neuf minutes (pour un album qui fait une demie-heure) interminables, qui voulaient probablement partir plus loin, mais se gauffrent lamentablement. Rien ne va :batterie rachitique (un comble !), riffing insignifiant, et samples robotiques si
cheaps qu'on pourrait les croire sortis d'Universal Soundbank. Un choix que je ne comprends pas, surtout pour un genre qui pardonne rarement les boursouflures.
Je ne boude cependant pas mon plaisir, celui de retrouver une vieille connaissance perdue de vue depuis un sacré moment. De constater avec plaisir que le temps n'a pas eu d'emprise sur elle. De reconnaître que même si elle n'est ni la plus rapide, ni la plus balèze, ni la plus puissante des formations du style, son humour, son petit grain, et surtout, sa personnalité, lui accordent une place à part dans mon petit cœur.
"Verk Ferever" a beau ne pas être la déflagration de l'année, elle reste une curiosité qui mérite votre intérêt.
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