« C'était le temps, le temps béni du death suédois-euh,
C'était le temps où Dan Swanö faisait la loi,
Tous les bons groupes enregistraient à l'Unisound-euh
C'était un temps, un temps béni que ce temps là ! »
Bah quoi ? Si on peut plus reprendre du Serge Lama pour évoquer les temps anciens alors, va falloir faire comment: avec du Cabrel ? Toujours utile qu'en ces jours heureux et pleins d'insouciance où j'avais fraîchement atteint mes deux dizaines d'années, sortait l'un de ces tous premiers numéros de Metallian dont la qualité permettait alors de faire l'éducation métallique - en même temps que le bonheur - de tout plein de jeunes dépourvus d'Internet mais amateurs de sensations fortes. Et voilà-t-y pas que dans le dernier numéro, deux petits groupes dont votre serviteur n'avait jamais entendu parler sortaient chacun un album qui faisait se pâmer les chroniqueurs et exploser les 6 bombinettes, gage d'une qualité maximale. A l'occasion d'un passage aussi inattendu que bienvenu dans la capitale, le jeune fiévreux que j'étais alors sauta dans le premier Virgin Megastore des Champs Elysées venu et en ressortit avec ses proies longtemps convoitées:
« Storm of the light's bane » de qui vous savez et ce « Shadow's dance ».
OK, ce long prologue doit vous avoir mis la puce à l'oreille et vous avoir amené à vous méfier de mon objectivité quant à la valeur de cet album - les souvenirs, la nostalgie tout-ça-tout-ça risquant de nuire à l'analyse froide qui siérait normalement à la dissection du présent produit. Et bien pour vous épargner le travail de déchiffrage des faiblesses de cet opus au travers d'un tissu chroniquatoire potentiellement trop enthousiaste, je vais commencer en cassant un peu de sucre sur le dos de cette galette (
on dit crêpe, plutôt que galette, quand c'est sucré non ? Y a des bretons par ici ?).
Des pets de travers, on en trouve sur ce disque. En effet, pour commencer, la prod' n'y est pas merveilleuse, bien que
Swanö y ait mis son nez: le son de batterie est plat et sonne trop artificiel, et le pire, c'est que l'ossature et la plus grande force de cet album, la guitare rythmique, souffre de l'effet « chipster »: un son crépitant, croustillant, mais trop léger. Ca manque de densité tout ça, même si ce côté grésillant apporte une touche perso' que moi personnellement j'adore … Il aurait juste fallu ajouter une grosse paire de couilles au rendu final et ça aurait été l'orgie.
Le deuxième point noir (si on le prend comme tel), c'est le manque de personnalité certain du groupe: tout sur cet album crie l'influence qu'a eu
Edge of Sanity sur ces jeunes suédois, et en particulier l'album
« Purgatory Afterglow ». « Abandon », qui ouvre l'album, c'est carrément « Twilight »: tout juste si on ne peut pas chanter le célèbre «
From dusk to dawn. That's when we arise. » sur les premiers couplets. Puis tout le long, on retrouve de grosses louches Swanötesques: le gros growl chaleureux, le chant clair gothicisant posé sur quelques passages plus calmes, le death suédois mélodico-mélancolique avec, néanmoins, le turbopropulseur de série … Jusqu'au final abrupt de « Shadow's dance » qui rappel celui de « Song of Sirens ». Et à côté de ça, le groupe nous place un plan 200%
Megadeth en début de « Rotten in Peace » (
comprendre « Rust in peace » ?) - même qu'on se demande si Dave Mustaine n'est pas en featuring sur le titre ! Et pour finir, régulièrement (enfin surtout sur Make you pay » et « Shadow's Dance »), on croirait entendre du
Tiamat période
« Wildhoney ».
En plus figurent dans le titre éponyme quelques petites balourderies qui font regretter (très légèrement) que celui-ci se place en toute fin d'album.
Au vu de tout ça, on se demande bien d'où vient ce 8/10. En fait, ce 8 ne s'explique qu'
à cause des défauts ci-dessus, sinon j'aurais eu bien du mal à ne pas aller flirter vers les sommets du double cinq. Cet album - même s'il le copie de trop près - a la flamme, l'accroche, la puissance et la mélodie du
Edge of Sanity des meilleurs jours. Les rythmiques, puissantes, saccadées, dévastatrices, contrastent violemment avec un synthé présent mais pas envahissant qui développe des ambiances et des mélodies divines. Les solos sont tous parfaits, lorgnant vers une maestria blues/rock technique plutôt que vers l'hystérie slayerienne. Le chant est varié, même si un peu en dessous de ce que peut produire notre Dan préféré. Enfin, les compos tuent, et sont très variées. Evoquons-en deux-trois seulement, pour ne pas être trop gavant: « Tear it down » est l'évocation musicale (mais pas textuelle) d'un mourant parcourant ses derniers kilomètres dans le désert, porté par la pesanteur majestueuse d'un death doomy, à la rythmique très marquée et aux atmosphères alliant légèreté et lourdeur plombée sans qu'on comprenne bien comment. « In the Ocean sky » est un instrumental qui pourrait être vu comme une ré-interprétation légèrement colorée de death suédois d'un morceau de Satriani sur sa période « Flying in a blue dream » / « The Extremist ». Enfin « Leavetaking » n'est rien de moins que le morceau que je voudrais qu'on joue pour mon enterrement: rarement auront aussi bien été exprimées la rage et la douleur ressenties quand on perd un proche. Cette tension s'exprime sur un morceau plombé à l'extrême, grave, où les guitares rythmiques, royalement funèbres, portent le cercueil sur une cadence doomy alors que de légers volutes de claviers viennent caresser la joue du défunt … ‘tain ça me ferait aimer les enterrements ces conneries !
Bon, arrêtons là cette chronique encore une fois trop longue. Que les amoureux de puissance et de mélodie à la
Edge of Sanity, qui n'ont pas peur d'un brin de clavier, d'un doigt de doom et d'un poil de chant clair dans leur death suédois sautent sur cet album: c'est une merveille gorgée de feeling et d'une patate grosse comme ça !
3 COMMENTAIRE(S)
29/10/2007 20:05
Jamais! Mais 'tain tu me donnes envie mon salaud (désolé Deadounet...)!
Pas de problème. Il me semble qu'ils ont changé de style après celui-ci
29/10/2007 18:43
Jamais! Mais 'tain tu me donnes envie mon salaud (désolé Deadounet...)!
Je vais m'empresser d'écouter çà!
:swano groupie:
29/10/2007 02:25